lundi 25 mai 2015

La Critique Dessinée : MAD MAX FURY ROAD



J’ai découvert Mad Max il y a quatre ans après en avoir eu assez de voir revenir constamment des références à cette série de films dans tout ce que je lisais, regardais et jouais, et c’est comme ça qu’un beau jour je me suis réservé une soirée avec une coloc, où nous nous sommes ingurgité l’intégralité de la trilogie.

Nous en sommes sortis avec le même résumé : "un cinglé qui poursuit des fous furieux, des fous furieux qui poursuite un cinglé, le tout dans un monde complètement taré". Et c'était jouissif. 

L’univers du premier est plutôt urbain et racle l'asphalte, le second est désertique et avale la poussière du bitume. Le troisième par contre s'embourbe quelque peu dans le goudron pas encore sec.

( A sa décharge, ce dernier Mad Max Au Delà du Dôme du Tonnerre nous aura tout de même donné un tube de Tina Turner, We Don't Need Another Hero ).




Oui, mais...do we need another Mad Max ? C’est avec appréhension que j’ai attendu le quatrième film, surtout que la mode semble être aux reboots plus ou moins médiocres. Les super-héros n’arrêtent pas de redémarrer à zéro leur franchise toutes les deux minutes, et les producteurs semblent vouloir tirer les restes récalcitrants du dentifrice de la nostalgie en ranimant soit des joujous mécaniques comme Robocop ou Transformers, ou tout les reptiles des temps passés tels que Godzilla, les tortues Ninja et bientôt les dinosaures de mon enfance. 

Là où on pouvait se rassurer un peu c'était de savoir que George Miller, le génial géniteur de la série d'origine, était aux commandes, fort de son expérience sur d’autres films d’action tout aussi violents comme que Babe et Happy Feet ( je déconne pas ! ) et revenant trente ans après sur le titre qui avait fait offert sa renommée mondiale au cinéma australien.

Et quel plaisir de voir que Mad Max : Fury Road, attendu au tournant, réussit un dérapage parfaitement contrôlé, et gagne sur tous les points nécessaires pour un divertissement de qualité en même temps qu'il perd tous ses points sur son permis de conduire.

L'atmosphère est aussi brûlante qu'un capot en surchauffe ou les sièges en cuir d'une vieille berline laissée au soleil. Ça vrombit et pétarade dans les tympans, ça pue le gazole et le vieux pot d'échappement. On est dans le paradoxe du plaisir que procure l'excès de vitesse avec des bagnoles polluantes dans un enfer aride qu'on sait justement causé par la connerie humaine et son amour décomplexé du vroum-vroum.




Le scénario tient sur une serviette en papier pliée en quatre : sur une terre désolée post-apocalyptique, Max, éternel errant de la route, se fait enlever par les mercenaires d’Immonen Joe, tyran hideux de la Citadelle, qui maintient la population sous son joug en ayant de contrôle de la distribution d'eau. Les choses lui échappent lorsqu’il se rend compte qu’une de ses meilleures convoyeuses, Furiosa, a décidé de le trahir en fuyant son autocratie et surtout en embarquant cinq de ses « épouses » qu’il retenait enfermées comme des poules pondeuses. Le reste est une énorme course-poursuite à toutes berzingues,dans laquelle Mad Max est embarqué et file un coup de main à Furiosa pour arriver à destination... 

Cela aurait pu être un Fast and Furious en un peu plus orangé, mais que nenni: ce long-métrage se différencie des autres films d'action à gros budget sur deux points 

1) une préférence pour les prise de vue et cascades réelles qui vous font mordre le dossier du fauteuil devant vous à chaque cabriole et explosion, une immersion qu'on n'avait plus ressentie depuis que l'abus des images de synthèse nous faisait plutôt ronger notre frein pendant toute la séance.

2) les trouvailles visuelles et la créativité qui émane de cet univers à la mythologie déjà riche et constamment creusée à chaque nouvel opus. C'est comme si le réalisateur  avait consigné sur un petit carnet tous ses délires pendant les trois décennies d'enfer de développement du projet.

Non, disons sur plusieurs carnets.

George Miller ne réinvente pas réellement le film d’action, il revient simplement aux bases de tout ce qui marchait bien auparavant.

Et il réussit à faire de gicler une saturation de testostérone à chaque plan. C'est simple, c'est un monstrueux patchwork d'à peu près tous les fantasmes masculins, une orgie d'automobiles surtunées, des mobylettes hypracustomisées, des machines de guerres hérissées de mohawks.... Pour vous offrir la paire de cojones sur le gâteau, nous avons droit à un monster truck chargé d'enceintes avec un métalleux frénétique qui joue un riff infernal sur une guitare électrique crachant des flammes.

Mais, et c'est là encore un paradoxe, pas mal d’œstrogène s'en dégage également, car les personnages centraux sont bel et bien  Furiosa et les cinq épouses du gros bad guy. Max et un jeune Warboy (joué par Nicholas Hoult ) sont également des protagonistes mais ont en réalité plutôt un rôle d’adjuvants, ne faisant qu’accompagner les damoiselles pas du tout en détresse. Leur quête est le véritable moteur de l'histoire.

Charlize Theron, égérie glamour de Dior, se pare d'un look "cambouis-chic" pour incarner l’Imperator Furiosa, un personnage fichtrement hypnotisant, défini par sa détermination et sa volonté de garder le cap et de foncer droit devant elle quoi qu'il arrive ( une lubie partagée par son personnage dans Prometheus, qui la conduit à la mort d’ailleurs…)

Souvenons-nous.

En véritable "badasse", elle offre un magistral bras (mécanique) d’honneur aux machistes de tous poils qui peuplent cette société future. Les autres personnages féminins ne sont pas en reste, avec un quintette de top-models qui n'auraient servi qu'à remplir le quota-nichon obligatoire dans d'autres bollock-busters moins avisés. Chacune ont leur caractère et personnalité bien trempés et arrivent à tenir tête à l'armée exclusivement masculine qui les talonne.

Qu'en est-il alors du héros éponyme ? Mel Gibson, blouson de cuir et nuque longue au vent était après tout LE Mad Max définitif. C'est peut-être sur ce point que le film a du mal à justifier son titre, ce qui peut être un problème. Tom Hardy ne semble pas vouloir nous donner une réinterprétation du légendaire road warrior et  se cantonne à  rester dans la même lignée du loup solitaire peu loquace - à peine a-t-il quelques lignes de dialogues de plus que Ryan Gosling dans Drive. Il est même plutôt fantomatique, cette suite/reboot décidant de ne pas offrir d'introduction et de contexte à son personnage, laissant le soin au public d'imaginer quelles atrocités il a dû subir pour en arriver à son déséquilibre psychologique, éponyme lui aussi.

Il y a une caractérisation du personnage assez similaire au traitement qui a été de James Bond avec Daniel Craig, c’est-à-dire un personnage d’action bien buriné qui, malgré sa carrure impressionnante et la carapace derrière laquelle il se renferme, donne tout de même un sentiment de fragilité réaliste avec les nombreuses blessures et coups durs qu'il encaisse. Tout comme ce même James Bond, il subira également plusieurs humiliations physiques, la plus mémorable étant la scène où il est harnaché sur le devant d’un véhicule tel un ornement de capot vivant. 

A croire que depuis Bane, Tom Hardy aime avoir du métal sur la gueule.

Beaucoup d’agités du phallus, avant même la sortie du film et surtout depuis, ont crié au pamphlet féministe (c’est d’ailleurs cet argument qui m’a poussé à aller le voir). Mon verdict tient en deux mots : "oui, mais".

Il s’agit PAS du féminisme tel que les têtus s'obstinent à l’imaginer ( en chiennes de garde castratrices). Non, nous parlons de la véritable notion du féminisme, qui recherche l'égalité entre les sexes, qui démontre la façon dont notre société peut encore être engoncée dans son patriarcat et considérer les femmes comme des objets. Le féminisme souhaite une coopération, pas un renversement des positions de domination. Cela est limpide dans le film et fonctionne par symboles : Immonen Joe et ses sbires représentent à peu près tout ce qu’il y a de pire chez le mâle et traitent les femmes comme du bétail, mais le modèle masculin proposé par Max est l’alternative possible, un homme qui a gardé ses chromosomes X et Y, mais qui ne recherche pas le pouvoir et voit ces femmes comme des égales. 

C'est pour moi la raison qui fait que, malgré un scénario bien mince, le film vous hante longtemps après son visionnage : pas seulement pour ses séquences d’actions, mais pour les métaphores puissantes qui s'en dégagent.

Je retourne bientôt voir cette rugissante symphonie de grosses caisses, et je vous conseille de faire de même.

Pour ceux qui l'ont vu, qu'en avez-vous pensé ? N'hésitez pas à laisser des commentaires !






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